Intouchables
Eric Toledano & Olivier Nakache

EnterreL’optimisme béat d’Intouchables paralyse tout : de la mise en scène jusqu’au message social, Intouchables c’est le néant artistique sur un sujet qui méritait de la subtilité. Le message du film ? Les jeunes des cités ne sont pas tous des racailles (mais ils restent incultes), les handicapés sont des gens comme nous (quand ils sont riches). Autant pisser dans un violon : les vertus de la mixité socio-économico-physique sont noyées dans le miel, et le potentiel comique de cette confrontation est un pétard mouillé.

Déjà, Intouchables n’est pas un film, c’est une suite de sketches orchestrés par Omar Sy. Pas d’idée de mise en scène, tout, absolument tout repose sur l’acteur comique, qui est de tous les plans et porte à lui seul le scénario : c’est lui qui fait les allers-retours entre la cité et le palace de Cluzet, et c’est lui le détonateur du décalage culturel. Pis, il semble que les réalisateurs aient décidé de lui confier également le rôle de dialoguiste. Et dans ce domaine on est consterné par tant de facilité. «Pas de bras, pas de chocolat », « il [François Cluzet] ne s’est pas levé du bon pied »… Le catalogue des blagues Carambar y passe. Chaque scène est prétexte à une bonne vanne d’Omar Sy, pendant que les autres protagonistes assistent médusés à un one-man show dont la trivialité, voire la vulgarité (sous couvert de franc-parler et de spontanéité) laisse pantois. Les exemples pleuvent : Omar se choque de devoir « vider le cul d’un mec qu’il ne connaît pas », il demande, hilare, à la gouvernante, si le jardinier ne lui a pas mis son « petit concombre ». Bigard style.

Intouchables aurait pu se contenter d’être un film comique de moyen-bas étage, mais il a malheureusement l’ambition de donner dans le social en nous incitant à changer notre regard sur les handicapés et les jeunes de banlieue. Enrobée d’un enthousiasme forcené, cette ambition est vite reléguée au rang de vœu pieu. Parce que dans Intouchables tout est trop simple, chaque problème a sa solution tout de suite, tout conflit culturel est désamorcé à la vitesse de la lumière. On veut bien mettre le spectateur dans l’inconfort oui, mais on passe très vite afin de ne pas trop le chambouler. Ainsi, Cluzet, avide de sensations fortes, se plaint de la lenteur de son fauteuil roulant ? Aucun problème, Omar lui trouve un garagiste pour lui poser un moteur de compétition dessus. Cluzet donne une leçon d’art contemporain à Omar ? Omar nous refait deux minutes plus tard le sketch des Inconnus sur Romano Chucalescu, il peinturlure une toile comme un gamin de 5 ans et la vend 11 000 euros.

Il est tout simplement impossible de s’attacher à ces personnages parce qu’ils sont vides de sens et n’évoquent rien d’autre qu’une forme de modèle rêvé de leur condition. Dans Intouchables, on essaie de faire rire et d’ouvrir les yeux du spectateur en prenant le minimum de risques : jamais on ne déborde d’un cadre prémâché, jamais on ne titille l’intelligence du spectateur. On est simplement dans la pure bienveillance molle. C’est ce qu’on appelle un film-légume.bub

François Corda

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Intouchables d’Eric Toledano & Olivier Nakache (France ; 1h52)

Date de sortie : 2 novembre 2011

bub

Showing 2 comments
  • dok

    0 ? Absolument RIEN ne vous a donc plu dans ce film ?

  • Billy

    Pour être franc, si Intouchables avait été un téléfilm j’aurais pu lui mettre une note supérieure. 4/20 par exemple, parce que oui, j’ai souri quelques fois. Est-ce que cela aurait changé quelque chose ? Je ne crois pas. À mon sens, Intouchables ce n’est pas du cinéma formellement parlant (cf. la chronique), et c’est moralement très discutable (cf. la chronique, itout). Donc 0. me semble être la note la plus proche de ce qu’il représente en tant qu’objet cinématographique. Un film n’est pas, je pense, une somme de scènes que l’on note séparément, c’est un tout. Bien à vous.

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