L’Arnacoeur
Pascal Chaumeil

EnterreL’Arnacoeur de Pascal Chaumeil est une comédie romantique qui ne trouve que rarement l’incision nécessaire pour nous faire sortir du rythme plan-plan dans lequel elle s’installe rapidement. Et quand L’Arnacoeur s’éveille, c’est surtout pour éclipser la fadeur du duo star à la faveur de seconds rôles beaucoup plus percutants.

Romain Duris, de tous les plans, en plein trip Actor’s Studio, est assommant. On a le sentiment qu’il sautille, grimace, se contorsionne pour donner coûte que coûte de la vie à L’Arnacoeur. Alex qui rencontre sa copine par erreur, Alex en clochard qui reçoit un doggy bag de la part du futur mari soi-disant radin de Vanessa Paradis… Les situations sont là, les vannes fusent, mais sonnent souvent comme des défis de dialoguiste un peu vains si bien que le jeu physique de Duris ne fait que rarement mouche. La musique tonitruante, la voix off passagère n’arrangent rien, ils sont autant de tics qui peinent à donner une impulsion à un scénario couru d’avance : en gros Alex se retrouve dans la position de l’arroseur arrosé, le briseur de couple professionnel tombe sous le charme de l’une de ses victimes potentielles. Le film ne tire de ce postulat intéressant que très peu d’effets comiques forts. Il faut dire qu’Alex et Juliette sont très binaires : l’un est un petit escroc des cœurs, l’autre une bourgeoise aux goûts ringards (Georges Michael, Dirty Dancing), et leur assurance ne sera chamboulée que dans les dernières minutes du film. C’est beaucoup trop tard pour que l’on puisse s’emporter pour ces héros empreints de certitudes.

Drôle de film, dans lequel les personnages secondaires semblent finalement beaucoup plus fins que les premiers rôles. C’est d’eux que vient le salut, par sursauts, au gré des interventions de François Damiens et Helena Noguerra. Leurs personnages déjantés font en effet figure d’extraterrestres dans cet océan de conformité, ils balayent la poussière qui recouvre les stéréotypes incarnés par Duris et Paradis, nous éblouissent le temps de quelques scènes courtes mais mémorables. François Damiens qui interprète un plombier polonais est hilarant. Helena Noguerra campant une nymphomane qui s’exclame avec beaucoup de naturel qu’elle a des fourmis dans la chatte, c’est tellement énorme que c’est … poilant.

L’Arnacoeur s’achève curieusement sur une note très amère : on y voit l’ex-futur marié, Jonathan, seul, abandonné à quelques mètres de l’autel par Juliette qui s’est enfuie pour rejoindre Alex. On compatit au désarroi profond de cet homme pour qui tout allait bien et dont le rêve s’écroule, sans raisons, en quelques secondes. Et on compatit d’autant plus quand on le voit se faire harponner par l’intéressée Sophie (Helena Noguerra) venue le « consoler ». Les seconds rôles prennent alors la place des premiers : Sophie devient le double d’Alex, Jonathan celui de Juliette, la boucle est bouclée. Mais le personnage le plus beau et le plus digne restera sans aucun doute celui de Jonathan, dont le destin d’éternelle victime aurait pu réellement faire un film dans le film. Cet anglais affable n’apparaît que quelques secondes et fait office de symbole : dans L’Arnacoeur, le potentiel des personnages est inversement proportionnel à leur temps de présence à l’écran.

François Corda

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L’Arnacoeur de Pascal Chaumeil (Monaco, France ; 1h45)

Date de sortie : 17 mars 2012

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