Dans une forme si parfaitement synth-pop, les norvégiens d’Ulver matérialisent dans une sorte de jubilation morbide une décadence classieuse. L’effondrement a lieu en trépignant nonchalamment sur un son délicatement new wave.
Après avoir démarré leur carrière dans les années quatre-vingt-dix avec un black metal brumeux, aux accents folk, et avoir depuis les années 2000 explosé à peu près toutes les frontières musicales possibles, le groupe embrasse cette fois langoureusement grooves et beats mâtinés de nappes synthétiques. Seule la mise en image de cette bande-son apocalyptique ne change pas : Rome, l’église, la civilisation – peu importe sa forme – continue de brûler.
Moins expérimental et plus facile d’accès que sur les disques précédents, le ton de ces fleurs du mal (fameuses Flowers of Evil donnant leur nom à l’album donc) se révèle pourtant d’une noirceur impeccable, reflétant un désespoir immense. Si double-pédale, guitares sous-accordées et voix d’outre-tombe ont été abandonnées depuis longtemps, reste ce spleen si profond, mis en valeur par une austérité bienvenue et une remarquable concision.
François Armand
Ulver / flowers of evil (Norvège | 28 août 2020)