UNE PLUIE SANS FIN
Dong Yue

On pourrait en vouloir à Dong Yue de saborder son enquête, dont il semble se désintéresser très rapidement. Mais le personnage de Yu Guowei est tellement charismatique qu’on en vient presque à oublier cette négligence assumée.

Le réalisateur Chinois, en refusant de se confronter aux conventions du thriller classique, nous offre une belle exploration du monde intérieur de Yu Guowei, qui se déplace lentement et sûrement aux confins de la folie. Si l’élucidation de cette série de meurtres pourrait sans doute donner un sens à une vie jusque là dédiée à la surveillance d’une usine (ce qu’il fait d’ailleurs avec une acuité proche du don), l’ironie veut que ce soit précisément cet enfermement mental qui le fait passer à côté : son obsession l’aveugle face à l’admiration et la tendresse qu’on lui porte.

En ce sens, le dernier plan, où l’on voit Yu Guowei dans un bus bloqué par la neige alors que celui-ci devrait lui permettre de s’échapper du bourbier dans lequel il vit depuis sa naissance (et qui est magnifié par la photographie de Cao Tao), est à la fois cruel et très beau, d’une mélancolie amère qu’on n’est pas prêt d’oublier.

François Corda

| 25 Juillet 2018| Chine


 

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