HOSTILES
Scott Cooper

EnterreL’ouverture de Hostiles promet de grandes choses : il y a le souffle d’une époque, dangereuse et sauvage, l’ampleur dramatique, le frisson, l’horreur… Puis le film de Scott Cooper se consume à petit feu, malgré la majestuosité des espaces encore vierges et la grandeur des sentiments, l’ambition historique et humaine  du réalisateur butant contre une vilaine psychologie de comptoir.

En nous narrant le road trip d’un chef indien prisonnier et mourant, reconduit dans une réserve par l’oppresseur (ici incarné par un  Christian Bale assez monolithique), c’est toute la charge émotionnelle d’un conflit sanglant que tente de nous retransmettre Scott Cooper. La petite histoire qui rejoint la grande, voilà un procédé noble mais qui n’a rien de nouveau, et qui nécessite surtout une finesse à laquelle semble tout à fait étranger le réalisateur Américain :  au gré de scènes et dialogues boursouflés (le capitaine Blocker, hurlant à la lune dans un désert électrique, Rosalie Quaid, veuve martyr, dans un délire post-traumatique surjoué), on finit par se souvenir, bon gré mal gré, des Brasiers de la colère, scénarisé et réalisé par le même Scott Cooper. Animé du même volontarisme humaniste, mais aussi de la même morgue manichéenne et pompeuse, le deuxième film du réalisateur souffrait déjà d’un cruel manque de nuances.

Au-delà de cet élan rédempteur, qui met sur un pied d’égalité la barbarie des deux camps, Cooper n’est malheureusement jamais loin de l’auto-flagellation factice (le duel final, la repentance d’un chien de guerre sous la pluie battante). Mais c’est surtout la conversion express d’un homme d’armes ouvertement raciste, belliqueux, violent et revanchard (rien que ça) en héros anti-colonialiste qui rend Hostiles assez déplaisant. Si le message est louable (l’homme peut changer, le pardon est salvateur), le cheminement intellectuel de Blocker, à l’écran, désole un peu par son simplisme, et par voie de fait, son manque de crédibilité. Sans compter que Cooper n’hésite pas, dans un final très tangent, à réhabiliter son « héros » : de boucher sanguinaire et fier de lui (cf. l’échange dans le camp entre Blocker et Metz), le soldat sans foi ni loi des débuts finit représenté comme une figure tutélaire, tête haute, l’horizon du rêve Américain devant lui, libre comme l’air. La nausée n’est pas loin.

François Corda

| 14 mars 2018 | Etats-Unis

 

 

bub

08/20

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