ANTHONY KEYEUX AKA HYPO
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FocusAnthony Keyeux aka Hypo est un modèle d’élasticité musicale. Depuis dix ans maintenant (l’extrême et ravissant Kotva date de 2001), le gourou brocanteur Keyeux  déploie ses tentacules colorées et pioche dans tous les styles possibles et imaginables, de l’électro au jazz, en passant par la cold wave, le noise voire le folk et la musique concrète. Il cuisine ensuite dans de grands fait-tout un peu rouillés, par pincées. Mais le fumet n’en est que meilleur, et le goût… Les anglais diraient super-tasty !

Hypo propose une expérience chaque fois nouvelle, qui a pour point commun la sublimation du bordel : entre morceaux faussement aimables et véritables casse-têtes japonais, les premières écoutes se frayent toujours difficilement un chemin dans les conduits auditifs ; même si ceux-là sont rodés à la folie du parisien. Mais contrairement à d’autres énergumènes qui finissent par se perdre en constituant leur propre labyrinthe sonore (on pourrait citer Animal Collective entre autres), Anthony Keyeux tient en permanence son fil d’Ariane. Et il a la gentillesse de savoir nous le tendre à l’occasion, histoire que l’on se raccroche aux arbres, et que l’on ait envie de revenir dans sa forêt fluo. C’est un pari ardu, mais si l’on y met la volonté, on y découvre des paysages musicaux absolument magiques.

Après l’impeccable The Correct Use of Pets (2006), plus évident et qui constitue par là même une belle porte d’entrée dans ce monde à part, Hypo est revenu en 2010 avec Coco Douleur à ses petits démons joueurs : c’est fou, ludique, bordélique…  Et incroyablement séduisant.

Finalement, on a la sensation que, plus le temps passe et plus la musique d’Antony Keyeux se fait séduisante, presque sensuelle. Certes on navigue toujours en eaux troubles, certes on voyage toujours en absurdie, mais les codes apparaissent désormais plus rapidement. Et on se surprend alors à penser qu’Hypo n’est (presque) rien d’autre que de l’électro pop dansante… Complètement dérangée, totalement décalée, mais incroyablement cohérente dans son délire.

François Corda

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