Après Get Out, Jordan Peele devait confirmer pour se hisser au niveau des rares (bons) auteurs de cinéma d’horreur. La bonne nouvelle que l’on peut tirer de Us, c’est que Peele a définitivement du talent. La mauvaise, c’est qu’il aurait du cette fois s’accompagner d’un scénariste.
Impeccable dès qu’il s’agit de filmer la distorsion de la réalité (la rencontre des doubles, flippante à souhait) ou de se montrer grinçant (quelques scènes très drôles s’insèrent parfaitement, comme dans Get Out, sans que cela désamorce le trouble), Peele s’égare malheureusement dans le déroulement de son récit, lançant des pistes (sociologiques avec le déterminisme social, fantastiques avec le surgissement de l’impossible) qui n’aboutissent que trop peu ou trop tard. Si le réalisateur américain achève Us avec brio (une scène de danse morbide et une révélation à couper le souffle, toutes deux majestueusement mises en scène), un goût de déception persiste.
Sans doute Jordan Peele aurait-il du se montrer plus frontal dans l’horreur (ici plutôt sage malgré les mises à mort en tous genres) et resserrer sa narration autour du seul enjeu réel de son film : la société parallèle, sorte d’équivalent trash et littéral de « la France d’en bas ». En l’état, malgré de très belles promesses, le projet reste trop long et éclaté pour emporter le morceau.
François Corda
| 20 mars 2019 | Etats-Unis