PANDA BEAR & VIET CONG
panda bear meets the grim reaper & s/t

EnterreDeterrePanda Bear et Viet Cong, sont tous deux liés à la pop comme à l’expérimental et tâchent de mêler les deux dans des mouvements opposés – le premier part de l’expérimentation pour tenter d’y mettre de la pop, tandis que les seconds ont de toute évidence la pop dans l’âme tout en se prêtant à la recherche sonore – chacune avec plus ou moins de bonheur.

Panda Bear (alias Noah Lennox), en tant que membre d’Animal Collective, est un habitué du bidouillage et de la recherche sonore. Cela se ressent tout au long de son nouveau Panda Bear Meets the Grim Reaper, lardé de bruitages à la pelle ; les morceaux sont méticuleusement habillés d’intrigants entrelacs électroniques et les ambiances particulièrement travaillées. Là où le bât blesse, c’est que si Lennox travaille dur pour nous fournir un décorum varié, on ne peut pas en dire autant de la construction de ses morceaux. Il semble évident que Panda Bear se rêve ici en popeux. Les gimmicks du genre y sont : beats et rythmes entraînants, harmonies vocales à la Brian Wilson et consorts. Mais les apparences ne parviennent pas à cacher de cruelles faiblesses dans la composition et dans l’interprétation. Les mélodies pondues par Lennox ne prennent pas, et à mesure des écoutes il apparaît que les moments qui attirent notre attention sont seulement ceux qui proposent de nouvelles idées sonores. Pour exemple, le single « Boys Latin » et son atmosphère riche en bruitages amusants et un habile jeu vocal de question-réponse en écho pour compenser les faiblesses de Lennox au chant. Cependant la première minute dépassée, le morceau se met déjà à tourner en rond, et on est vite gêné par le côté désincarné de la prestation vocale. Chez Panda Bear, le mouvement de l’expérimental vers la pop semble forcé.

Inversement, on ne s’imagine pas immédiatement parler de « pop » à l’écoute du disque de Viet Cong. La production y est crasseuse, l’atmosphère étouffante, le ton par moment carrément bruitiste. En surface du moins, car une investigation plus profond laisse apparaître que le cœur de la plupart des morceaux est bien plus léger qu’il n’en a l’air. En tentant de se figurer le processus de création du groupe, à partir de ce qu’on comprend de l’album, on s’imagine plus aisément les américains composer une mélodie, couplet-refrain (comme dans « Continental Shelf », piste la plus épurée du lot) ; puis dans un second temps construire – autour de ce qui pourrait facilement être une pop song aux accents sixties, psychédélique à la manière du premier Pink Floyd – des « arrangements » noisy, industriels. Une sorte de porte d’entrée en trompe l’œil, à l’image de ce « March of Progress » qui pendant trois minutes nous mène en bateau avec une rythmique troublante, chancelante, jusqu’à ce que la chanson en elle-même débarque, à grand renforts d’arpèges et autres harmonies vocales. Les atours rugueux n’auront servi qu’à hypnotiser l’auditeur pour mieux préparer le terrain avant l’entrée en scène du plat principal.

C’est en cela que Viet Cong accroche là où Panda Bear nous fait décrocher. La démarche noisy du premier, son écrin abrasif, ses envolées expérimentales, tout est mis au service des compositions pop, pour mieux les sublimer. Au contraire du second, qui ne parvient pas à articuler ces deux composantes de sa musique ; elles sont bien là, mais restent chacune dans leur coin tout au long de morceaux qui en deviennent longs comme un jour sans pain. Comme un mariage arrangé qui se maintient par la force des choses, pour les apparences, mais dont toute passion est absente.bub

Martin Souarn

 

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Panda Bear / panda bear meets the grim reaper

Date de sortie : 9 juin 2015

GG

Viet Cong / viet cong

Dates de sortie : 20 janvier 2015

 

bub

 

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